Face à l’expansion de la sésamie, un ravageur des cultures de maïs, la lutte biologique semble prometteuse grâce à l’insecte Cotesia typhae. Le résultat des essais en serre, très encourageant, laisse présager de nouvelles perspectives, avec à la clé une solution durable pour les agriculteurs.
La sésamie (Sesamia nonagrioides) est un lépidoptère s’attaquant aux cultures de maïs en France, causant des pertes significatives, notamment dans le sud et l’ouest du pays. Ce ravageur, venu d’Afrique il y a 180 000 ans, voit son aire de répartition s’étendre vers le nord en raison des hivers plus doux. Actuellement, il n’existe pas d’agent de biocontrôle pour lutter contre ce fléau, contrairement à la pyrale du maïs.

Cependant, l’espoir pourrait venir d’un insecte hyménoptère, Cotesia typhae, qui parasite les chenilles de S. nonagrioides au Kenya. Une longue collaboration entre l’International Centre of Insect Physiology and Ecology (icipe) de Nairobi et l’UMR EGCE (dont l’IRD est cotutelle) a permis d’établir la stricte spécificité parasitaire de C. typhae sur son aire de répartition en Afrique sub-saharienne. Un très faible risque pour des espèces non cibles en France a pu être confirmé. Des essais en serre menés par EGCE et Arvalis, financés par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR projet CoteBio), ont démontré l’efficacité de C. typhae pour parasiter les chenilles de la sésamie. Entre 2018 et 2022, quatre essais sous serre se sont déroulés. Deux analysaient les impacts à court terme (présence ou non d’un parasitisme 7 à 11 jours après le lâcher) révélant que jusqu’à 52 % des chenilles avaient été parasitées. Les deux autres étudiaient le parasitisme à long terme (3,5 mois sur une à deux générations de sésamie), se soldant par un taux de réduction des populations atteignant 98 %.
Ces résultats très encourageants ont conduit à la demande d’autorisation d’introduction de C. typhae en France pour des essais en plein champ. Le projet BIOCOSMA (ANR-Maturation), qui démarre cette année, vise à tester cette méthode en conditions réelles. Les chercheurs espèrent déterminer le nombre optimal d’individus à lâcher par hectare et la distance de dispersion de C. typhae pour maximiser son efficacité. En outre, ils prévoient de modéliser le système ravageur-parasitoïde afin de définir la période idéale pour l’introduction de l’insecte en fonction des conditions environnementales et biologiques.
Bien que les essais en plein champ puissent révéler des défis inattendus, les précédents succès en serre et les résultats obtenus au Brésil avec une espèce similaire, Cotesia flavipes, incitent à l’optimisme. Ce projet pourrait offrir une solution durable et écologique pour protéger les cultures de maïs en France contre la sésamie.
Pour aller plus loin :
Gravé J., Thibord J.-B., Kaiser L., Fortuna T. : Sésamie : la perspective d’utiliser la lutte biologique grandit, Perspectives Agricoles, 17 mai 2024 – Numéro 522 (article réservé aux abonnés).
Fortuna, T. M., Anne, M., Le Gonnidec, M., Jeannette, R., Bressac, C., Rebaudo, F., … & Kaiser, L. (2023). Susceptibility to cold suggests low risk of establishment of a tropical parasitoid attacking the corn pest Sesamia nonagrioides. Biological Control, 186, 105359.
Kaiser, L., Fernandez-Triana, J., Capdevielle-Dulac, C., Chantre, C., Bodet, M., Kaoula, F., Benoist, R., Calatayud, P.A., Dupas, S., Herniou, E.A. and Jeannette, R., 2017. Systematics and biology of Cotesia typhae sp. n.(Hymenoptera, Braconidae, Microgastrinae), a potential biological control agent against the noctuid Mediterranean corn borer, Sesamia nonagrioides. ZooKeys, (682), p.105.
